Magazine Surface Vol. 41 No 3

VOL. 41 NO 3 38 VOL. 41 NO 3 39 LES 90 ANS DE L’APDIQ 90 ANS DE DESIGN D’INTÉRIEUR AU QUÉBEC AUX ORIGINES : BÂTIR UNE VOIX COMMUNE En 1933, dans les salons feutrés de l’hôtel Windsor à Montréal, un petit groupe de décorateurs et de boutiquiers prend une décision qui allait marquer l’histoire du design d’intérieur au Québec. Inspirés par les mouvements professionnels qui s’organisaient déjà aux États-Unis et en Ontario, ils se rassemblent pour jeter les bases d’une association qui donnerait un cadre officiel à leur métier. Deux ans plus tard, le 28 octobre 1935, 13 pionniers obtiennent les lettres patentes qui accréditent la Interior Decorators Society of Quebec. Ce moment fondateur marque la naissance d’un organisme qui, au fil des décennies, accompagnera la profession dans sa quête de reconnaissance, d’encadrement et de valorisation. MABEL WILKERSON : UNE PIONNIÈRE VENUE D’AILLEURS Parmi les personnalités qui se démarquent dans ces premières décennies. Mabel Wilkerson occupe une place particulière. Originaire des États-Unis, elle est l’une des premières à introduire au Québec une vision moderniste du décor et de l’aménagement intérieur. Formée à New York, et directrice associée de la Parsons School of Design à Paris de 1927 à 1933, elle apporte avec elle une sensibilité où s’entremêlent fonctionnalité et raffinement, inspirée par les grands courants internationaux. Wilkerson s’implique dans l’association naissante et participe à l’élévation des standards de la profession. Elle défend l’importance d’une formation académique rigoureuse, à une époque où le métier était encore largement perçu comme une pratique artisanale ou intuitive. Sa contribution pave la voie à l’admission, dès 1945, de diplômés d’écoles spécialisées comme l’École du meuble de Montréal. DES JALONS DÉTERMINANTS Au fil des décennies, l’association a franchi des étapes qui ont profondément marqué son identité et structuré la profession. En 1948, l’Assemblée législative du Québec sanctionne une loi qui confirme officiellement l’existence de la Société des décorateurs-ensembliers du Québec. Pour la première fois, le titre de « décorateur d’intérieur certifié » bénéficie d’une protection légale, donnant aux membres une légitimité sans précédent. LOUIS MULLIGAN : L’HOMME DE LA MODERNITÉ Dans les années 1940 et 1950, un autre nom marque profondément le design québécois : Louis Mulligan. Designer d’intérieur, scénographe et enseignant, Mulligan est reconnu pour avoir contribué à professionnaliser la discipline. Il met de l’avant une conception du design qui dépasse la simple esthétique pour embrasser des considérations techniques, ergonomiques et sociales. Membre de la Interior Decorators Society of Quebec dès sa création, il se taille rapidement un place au sein du conseil et en devient le président en 1940. Son règne, le plus long dans l’association, durera jusqu’en 1961. Il mène avec ses collègues le dossier pour l’obtention d’un encadrement, obtenu en 1948. Son rôle d’enseignant, notamment à l’École du meuble, et comme conférencier pour le public et les étudiants, fait de lui un passeur essentiel entre les générations. Mulligan est de ceux qui ont insisté pour que la formation académique soit au cœur de la reconnaissance professionnelle. Il milite aussi pour que les décorateurs-ensembliers soient pleinement intégrés aux équipes multidisciplinaires aux côtés des architectes et ingénieurs. À travers son œuvre, Mulligan a su démontrer que le design d’intérieur participe à l’évolution des modes de vie, en accompagnant la modernisation du Québec et en intégrant de nouveaux matériaux, de nouvelles technologies et de nouvelles approches pédagogiques. Les années 1960 et 1970 sont celles de la modernisation. La charte est amendée en 1961 afin d’introduire un processus formel d’examen d’entrée, rehaussant ainsi les critères d’admission et confirmant la place de la formation académique comme pilier incontournable. Quelques années plus tard, en 1966, le mot « design » fait son entrée officielle dans la terminologie de l’association, symbolisant l’élargissement du champ d’action de la profession. Suit de près la création des cégeps en 1967 et celle du programme de design d’intérieur, qui sera offert dans cinq cégeps à travers le Québec. En 1975, cette évolution se concrétise par l’adoption d’une définition précise du rôle du designer d’intérieur, de ses compétences et de son cursus scolaire. JACQUES VIAU : LE MILITANT DE LA RECONNAISSANCE Dans les années 1960 et 1970, Jacques Viau incarne la défense acharnée de la profession. Figure respectée du milieu, il s’investit sans relâche au sein de l’association pour promouvoir une reconnaissance officielle et institutionnelle du design d’intérieur. Membre de la Société des décorateurs-ensembliers du Québec dès 1947 et des Designers d’intérieur du Canada depuis sa fondation en 1972, Jacques Viau a marqué de son empreinte le développement et la reconnaissance de la profession de designer d’intérieur au Québec. Viau a consacré une grande partie de sa carrière au développement de la profession et des institutions. Très actif dans le milieu associatif, il fut tour à tour : • trésorier de la Société d’art contemporain (1946-1947), • directeur et trésorier de la Société des décorateurs-ensem- bliers du Québec (1946-1950); • président de l’Association des hommes d’affaires du Saint- Laurent (1960-1962); • président de la Société des décorateurs-ensembliers du Québec (1965-1967), où il préside notamment un congrès international des designers à Québec; • directeur de l’Association des designers d’intérieur du Cana- da (1976), représentant la SDEQ à l’échelle nationale; • membre fondateur de l’Association des designers d’intérieur du Canada (IDC) en 1972 et nommé Fellow en 1989; • membre fondateur de FERDIE.

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