VOL. 38 NO 3 10 VOL. 38 NO 3 11 « Quelques-uns sont intéressés, révèle Isabelle Marier, de Formica. Surtout ceux qui sont moins réfractaires aux responsabilités. Afin de permettre cet avancement, nous avons revu nos critères à la baisse. Par exemple, le diplôme d’études secondaires n’est plus obligatoire. Sinon, le sentiment d’appartenance, c’est plus difficile à stimuler quand l’usine tourne 24/7. Si les évènements ne se déroulent pas sur les heures de travail ou sur le lieu de travail, ça n’est pas très populaire… Pas plus que le club social mensuel. Sur le plan de la rétention, on déplore l’absence de persévérance des nouveaux candidats. Ils ne s’accordent pas de période d’adaptation. Ils font une journée, ils n’aiment pas, ils ne reviennent pas. Ou ils travaillent trois jours et ne reviennent plus, sans donner de raison. D’autres arrivent et c’est souvent à recommencer. Malheureusement, il n’existe pas de solution miracle. » Chez Beaulieu Canada, on vient d’implanter une politique de flexibilité, possiblement apte à rejoindre les jeunes générations et les jeunes familles. Serge Marceau à ce sujet : « Il est maintenant possible de débuter entre 7 h et 9 h, et de terminer entre 17 h et 19 h. La possibilité de la semaine de travail de quatre jours, selon un horaire de neuf heures par jour, est aussi au programme. » « Il y a quelques jours, nous avons assisté à une démonstration d’une firme visant à optimiser l’utilisation de la tablette pour à la fois accélérer et simplifier nos processus, tout en se rapprochant du monde tout numérique de la jeune génération », rappelle Michel Gariépy. « L’employé apprend comment se promener partout dans l’usine avec un iPad, comment recevoir très facilement une formation et/ou des tutoriels portant sur une machine en particulier et son utilisation. Ça remplace le traditionnel cartable. Les rapports sont écrits et enregistrés directement sur l’appareil au lieu d’un bout de papier. Pour les jeunes, c’est plus vivant, plus concret. » INACTION — RÉACTION Il va sans dire que ces accommodements ne passent pas inaperçus auprès des travailleurs plus âgés, n’ayant jamais connu un tel degré de tolérance, voire de laxisme. « C’est certain que dans une petite entreprise, l’absence non justifiée d’un jeune peut susciter de la colère auprès des autres, car quand il en manque un, l’usine doit arrêter, avec tout ce que ça implique », livre Alexandra Fortier. « Il y a de l’incompréhension du côté des plus anciens. Ils trouvent ça difficile, c’est sûr, assure Naji Ghanem. Acceptent-ils cette nouvelle réalité à 100 %? Non, mais les choses ont changé et ils font preuve de résilience. » Possiblement même d’indulgence… « S’il y a des frictions générationnelles, il faut garder en tête que la jeune génération est le produit de notre société, de ce qu’on a créé », rappelle quant à lui Serge Marceau. « On se demande à quoi cela va ressembler lorsque les plus anciens, assidus et ponctuels, seront partis », demande avec raison Isabelle Marier. Mais, selon plusieurs, les protestations se feraient de moins en moins vives, car les revendications des Y et Z profiteraient également aux autres générations et que les gens près de la retraite sont partis. Plusieurs, âgés de 55 ans et plus, ont effectivement profité de la pandémie pour quitter le marché de la main-d’œuvre en usine ou sont en voie de le faire… Et la réalité démographique étant ce qu’elle est, le Québec ne compte pas assez de jeunes travailleurs pour les remplacer. L’EMPLOYÉ-RECRUTEUR : TOUJOURS D’ACTUALITÉ? S’il fut une époque où le recrutement s’effectuait auprès des membres de la famille des travailleurs, plusieurs sociologues sont d’avis que les nouvelles générations sont davantage portées à intégrer leurs amis proches dans leur environnement de travail, question de rester en contact quasi permanent. C’est d’ailleurs sur cette nouvelle réalité que la chaîne de restauration rapide McDonald’s mise dans ses publicités, en offrant la possibilité aux jeunes de travailler directement avec leur entourage. QU’EN EST-IL VRAIMENT? « En région, nos jeunes travailleurs ne cherchent pas cette association. Peut-être qu’à la campagne la démarcation entre travail et relations est-elle plus forte », commente Alexandra Fortier. « Chez Preverco, on recense beaucoup plus de référencement entre amis, et ça fonctionne. Ils restent souvent plus longtemps que lorsque recrutés par l’intermédiaire d’agences de placement. Souvent, les amis proposés sont intéressés par du temps partiel, ce à quoi nous sommes aussi ouverts », fait savoir Michel Gariépy. « La tendance a déjà été à la famille, mais c’est effectivement maintenant davantage orienté vers les amis, constate Isabelle Marier, qui ajoute du même souffle que la présence d’amis en lieu de travail aide à contrer le syndrome de l’employé qui part « parce que la gang était plate ». « Nos plus jeunes employés seront plus enclins à recruter amis ou membres de la famille, mais pas les plus anciens », dit Nicolas Jean. « Afin de démystifier le processus de recrutement et d’intégration à l’entreprise, Sika a tenu une journée portes ouvertes en juin dernier, en conviant les travailleurs et les intéressés susceptibles de faire la promotion de notre compagnie auprès de membres de la famille et/ou d’amis vivant à l’étranger », mentionne Naji Ghanem. DO S S I E R
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