Magazine Surface Vol. 38 No 2

VOL. 38 NO 2 8 VOL. 38 NO 2 9 « Commencez tôt et soyez prêt à passer le flambeau! ». Ce conseil, tous les intervenants spécialisés en relève d’entreprise familiale l’offrent aux propriétaires de PME québécoises, détaillants de revêtements de sol inclus. Bien sûr, la pandémie est venue chambouler toutes les notions liées aux modèles d’affaires connus, et selon les cas, a soit servi d’accélérateur ou de retardateur dans le transfert d’entreprise familiale. Comme vous le lirez plus loin, plusieurs nouveaux entrepreneurs se félicitent d’avoir pris le relais avant que la COVID-19 ne vienne prouver, hors de tout doute raisonnable, que les cédants étaient souvent devenus des dinosaures… soit des gestionnaires peu à l’aise avec la culture numérique et dépassés par la disparition de leur modèle d’affaires de référence. Entrevues. C’est un fait : tout entrepreneur désirant bénéficier des meilleures conditions fiscales et financières possible doit nécessairement planifier la relève plusieurs années à l’avance, et s’entourer d’une équipe de professionnels dédiés, au choix : notaire, comptable, fiscaliste, coach. Selon une étude de BDC menée en 2017, « cinq entrepreneurs sur six estimaient que le processus de transition peut être terminé en deux ans ou moins ». Une croyance que les experts resituent plutôt dans une période pouvant aller jusqu’à cinq ans et plus. L’étude note également que dans le cas d’une entreprise familiale, selon sa taille et sa complexité, le processus peut même s’échelonner sur une dizaine d’années. « On parle alors de transition et de gestion multigénérationnelle, explique Catherine S. Beaucage, CRHA, directrice transfert et rayonnement pour Familles en affaires – HEC Montréal. Tout au long du processus, on voit la relève développer ses compétences, apprivoiser l’entreprise. On peut certainement y observer des chocs de valeur, de vision, mais si tout est bien géré, cela constitue la situation idéale où les cédants apportent les compétences, l’expérience, le réseau, alors que la relève vient injecter l’énergie, les nouvelles idées. Intégrer tous ces éléments de manière organique, et non mécanique, crée une recette miracle. » Selon Mme Beaucage, une bonne partie du succès (ou non) d’un transfert familial d’entreprise tient dans la capacité à faire cohabiter les deux générations, sans tomber dans le paradigme « tradition versus innovation ». Elle est d’avis que, dans plusieurs cas, le contexte pandémique et ses innombrables problématiques pour le secteur du détail ont eu pour effet combiné une prise de conscience chez les cédants de l’importance et de l’urgence du transfert pour assurer la pérennité de la compagnie. Pour plusieurs, la crise sanitaire imposant aux 70 ans et plus de rester à domicile a constitué un baptême par le feu pour la nouvelle génération, forcée de prendre en mains les rênes de gestion, d’opération, d’approvisionnement et de service à la clientèle, entre autres choses. « Cela lui a permis de trouver rapidement sa place au sein de l’entreprise », précise Mme Beaucage. Sans surprise, la pandémie aurait eu un impact sur la santé physique et mentale des cédants, et aurait donc eu un effet accélérateur sur le transfert, mentionne-t-elle. « Le concept de propriété émotionnelle a pesé lourd sur les entrepreneurs. Souvent, plusieurs personnes dépendent directement ou indirectement de la vigueur financière de la compagnie, et cela ajoute à la pression ressentie par les dirigeants, car en plus d’être le gagne-pain de plusieurs personnes, elle en constitue aussi l’héritage. Nos données indiquent que les propriétaires qui auraient été épaulés par des membres de leur famille pendant la pandémie auraient eu tendance à s’en sortir mieux que d’autres, qui seraient demeurés muets sur leurs inquiétudes. ». La même étude révèle également que les dirigeants ont manifesté un grand besoin d’enrichir leurs compétences pour prendre ou accélérer le virage numérique suite à l’arrivée du célèbre virus : 65 % pour mieux réaliser le travail à distance; 69 % pour améliorer la gestion de leurs clients; 82 % pour développer ou améliorer leur marketing numérique; 58 % pour développer ou améliorer leur commerce électronique; 63 % pour mieux exploiter leurs bases des données. À noter : ces pourcentages relatifs au virage numérique seraient probablement moins élevés si l’on sondait la relève… pour qui le virage numérique est déjà pris. PLANIFIER SA RELÈVE, PAS SA MORT En 2022, les boomers sont encore et toujours les principaux propriétaires d’entreprises. Souvent issus du modèle selfmade man, qui repose sur un mélange de détermination et d’intuition entrepreneuriale, ceux-ci tardent souvent, encore aujourd’hui, à entamer la planification de leur relève, sous prétexte qu’ils ne peuvent s’imaginer à la retraite, que leur santé est bonne ou qu’ils sont à l’abri d’accidents. Et pourtant, l’absence de planification peut souvent se traduire par ce que craignent le plus la plupart d’entre eux : l’absence de relève, la fermeture de l’entreprise et/ou la vente d’actifs, ou la perte de contrôle sur la pérennité de celle-ci… Gina Raschella, avant de devenir coach professionnelle en transfert d’entreprise familiale, a connu une situation similaire lors de son passage chez Schneer. « La compagnie familiale, fondée en 1948, n’a pas Catherine S. Bocage, CRHA, directrice transfert et rayonnement pour Familles en affaires — HEC Montréal. par Yves Rivard DO S S I E R D ’ UN E G É N É R AT I ON À L’AU T R E

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